2020 s’en est allée

Article : 2020 s’en est allée
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10 janvier 2021

2020 s’en est allée

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2020 n’est plus – réalisé via Canva
L’année 2020 s’est achevée cédant sa place à 2021. Prenons un moment pour faire le bilan du règne de la reine déchue, et examinons les espoirs que nous plaçons en la tête nouvellement couronnée.

Au moment où je commence à rédiger ces lignes, 2020 se meurt tout doucement. Elle n’est pas encore complètement partie. Mais déjà, le vent nouveau qui se lève, brouille ses empreintes de pas sur le sable du temps.

Lentement, les secondes deviennent des minutes. Les minutes se rallongent en heures et les journées s’éteignent à contrecœur comme attristées de s’en aller définitivement. L’année qui demeurera à jamais gravée dans l’histoire, s’en va en trainant le pas, alors même qu’elle est arrivée avec de gros sabots, piétinant les récoltes avec une joie mauvaise. Egorgeant les poules, tel le loup aveugle à tout autre chose si ce n’est à sa rage écarlate.

Mais le moment venu de tirer sa révérence, j’ai l’impression que 2020 quémande la miséricorde et la compassion alors qu’elle n’en a eu aucune. Elle sait qu’une fois partie, elle ne reviendra plus jamais. Donc tout en suppliant, elle s’assure de frapper fort même dans ses derniers instants, histoire de rendre son passage éphémère dans l’histoire aussi épique que possible.

An de grâce 2020, la COVID-19 vue par ma fenêtre

Cette année écoulée a repoussé les limites de l’étrange plus loin qu’elles ne l’ont jamais été. Nous devons cet état de choses à la Covid-19. Evidemment, comment parler de 2020 sans faire une dédicace spéciale à la Covid-19 ? Ce fut sournois, inattendu, terrible.

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Covid-19 courant après un homme – Crédit : Sick Corona GIF Par Camdelafu via Giphy

Bien à l’abri dans le cocon de mon Lomé côtier, le coronavirus est apparu dans mon horizon comme une rumeur venue d’Orient. Elle a enflé en ralliant l’Occident puis l’Amérique, et un beau jour j’ai ouvert ma porte et elle était là. Prétendument réservée mais armée de la faux de la mort.

Mon père parle souvent d’un insecte qui se déplaçait à la surface des eaux stagnantes quand il était enfant. Cet insecte semble-t-il bougeait si vite qu’il en devenait flou. Je ne connais pas son nom. Mais la Covid me fait indubitablement penser à lui. Si vive que personne n’a pu ni la voir venir, ni prédire ses mouvements suivants.

La lady encapuchonnée et porteuse de mort a eu deux effets distincts sur nos côtes. D’un côté un vent de panique a soufflé sans discontinuité dans certains cœurs. De l’autre côté, il y avait ceux qui n’en avaient absolument rien à fiche.

Je me souviens des courses effrénées effectuées au petit matin. Je revois la désinvolture de certains qui préconisaient de prendre quelques verres de sodabi* pour prévenir le mal. Il y a ceux qui ont complètement sombré dans la paranoïa. Et entre parenthèses j’estime qu’à ce moment-là, cette paranoïa était légitime et justifiée. Nous faisions face à un mal dont personne ne maitrisait le codage. Il s’agissait d’avancer sur la pointe des pieds.

Je revois les lave-mains pousser comme de la mauvaise herbe. Ma maman était aux anges, elle qui est si maniaque en termes de propreté. Je réentends les spéculations quant à la genèse du corona. Entre nous, jusqu’aujourd’hui je trouve toute cette histoire un tantinet nébuleux. Rien de ce qui se dit n’est véritablement recevable à mes yeux. Bref.

Je revois les horreurs des violences policières qui ont suivi le premier couvre-feu instauré à Lomé. La dame à la faux -la Covid-  a entrainé dans son sillage sauvagerie, barbarie et une bonne dose d’inhumanité. Il est vrai que la Covid-19 a plutôt bien servie les intérêts politiques au Togo. Elle est tombée fort à propos dans le bras de fer qui s’est déroulée tout au long de 2020.

Je réentends le bruit assourdissant des commerces qui se cassent la figure. Je perçois le son grinçant de l’économie qui s’effrondre sur elle-même. Elle qui était déjà bien malmenée, la pauvre.

Je nous revois dépassant nos amis dans les rues sans les reconnaître. 2020 a été l’année qui la première a lancé cette mode. Vous savez les masques et toussa toussa. 2020 a été létale à souhait.

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Jeune homme noir portant un masque – Crédits : Photo by HaryisAf via Iwaria

Oui, c’est une année absolument mémorable que celle qui s’est achevée. Une année qui a fait de nous tous des soldats de l’hiver sur la face de la terre. Il ne nous manque que le panache meurtrier de ce bel homme et la mitrailleuse sanglée à son dos.

Pendant ce temps dans mon chez-moi personnel…

En ce qui me concerne, 2020 a été une année difficile à bien des niveaux. Je me revois assise au chevet de ma sœur clouée au lit avant et après son opération. Je jette un coup d’œil en arrière et je la vois se contorsionnant sous l’intense douleur. Je me vois à son coté la veillant et priant pour qu’elle se rétablisse vite. Une partie de mon esprit était alors tournée vers mon frère ainé que j’ai une fois pareillement veillé mais qui s’en est allé.

Je me souviens de mon autre frère perdant conscience dans la nuit profonde. Je réentends le bruit sourd qu’a fait sa grande masse en heurtant le sol. Je sens mon cœur saigner à nouveau en repensant à cette période. Oui, ce fut incontestablement une année difficile.

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J’ai survécu à 2020 – via Giphy

Ce fut aussi une année pleine de leçons. J’ai été confrontée à des choses que j’aurais préféré ignorer jusqu’à la fin du temps qui m’a été impartie sur terre. J’aurais aimé ne pas savoir certaines choses. Ne pas en entendre d’autres. Je me suis rendue compte que j’ai joué à l’autruche pendant longtemps sur des vérités qui pourtant me crevaient les yeux. Pourquoi les affronter alors que je pouvais juste les balayer sous le tapis ? Tant que je fermais mon esprit à leur réalité, ils ne pouvaient pas m’atteindre. Mécanisme de défense un rien puéril.

Mais 2020 s’est assuré de m’ôter les œillères. D’un coup sec et bien placé, cette année a arraché ma couverture. Elle m’a mise face à tout ce que je savais de manière diffuse sans me l’avouer. J’ai été obligée de faire face. Ce fut pénible, horrible. Ça m’a mise à genoux et presque emportée comme une feuille par grand vent.

Aujourd’hui, je vois bien que je ne suis plus la même personne qui a fermé les portes de décembre 2019 et franchi le seuil de janvier 2020. Je pense que c’est notre cas à tous. Mais je suis contente que le bruit monstrueux qu’a fait 2020 ait noyé le son ténu de mes pétages de plombs personnels (J’adore le rendu de cette phrase. Pas touche !).

2020 n’a certes pas été des plus tendres. Mais je suis reconnaissante d’en sortir grandie et la tête haute. Reconnaissante pour les mille et un moments volés qui maintiennent le navire à flots. Et aussi, quoi qu’ait fait cette année, je suis contente de pouvoir le traduire en mots sur ce blog.

2021, comme tu roules étrangement sur ma langue !

Que nous réserve l’année qui est maintenant installée dans notre intimité ? Nous ne le savons pas plus que nous n’avons su ce que 2020 avait dans sa valise pour nous. Oui, nous avons pris nos vieilles casseroles de 2020 par la main pour les emmener avec nous en 2021. Pas moyen de faire autrement. Et oui ! Dans les faits tout ce qui s’est produit c’est que la nuit est tombée et le soleil s’est levé une fois de plus. Et contrairement à tout ce qui se murmure, la vraie vérité c’est que 2021 a en elle le potentiel de faire bien pire que 2020. Tellement tellement pire ! 2021 s’étend devant nous tel un vaste champ. Nous moissonnerons en abondance où nous pleurerons nos récoltes brûlées.

Alors à défaut de connaître l’avenir avec certitude, nous ne pouvons qu’entretenir la flamme de l’espoir. Nous tâchons malgré la houle de préserver notre capacité à espérer. Nous nous tournons tous vers 2021 telles des fleurs avides de soleil pour éclore, soupirant après son étreinte chaleureuse.

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2021 – Image par Gerd Altmann de Pixabay

A titre personnel, je suis toute disposée à voir 2021 comme un champ plein de semences arrivées à maturité. Belles belles semences qui attendent d’être moissonnées. Je peux presque lécher sur mes doigts le gout sucré du nectar des fruits exotiques de cette grande récolte. Je peux humer la senteur capiteuse des fleurs arc-en-ciel. Je peux sentir se lever le vent délicieusement parfumé qui parle de belles choses à venir. Oui, je suis plus que disposée à croire que ce jour nouveau qui se lève verra une moisson abondante. Quoi que nous ait apporté le passé (et je pense que nous sommes tous soulagés de remiser 2020 dans la case « passé »), je me plais à croire que le meilleur est devant nous. The best is surely yet to come y’all.

Alors avez-vous fait un bilan de l’année 2020 ? Positif, négatif ou mitigé ? Et vos espoirs pour 2021, quels sont-ils ? Plein de personnes disent que le fait de nous souhaiter une bonne année ne nous a rien apporté de positif pour 2020. Mais j’aime autant jouer la carte de l’espoir et vous souhaiter une bonne année 2021. Bien de choses à vous.

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Homme mettant 2020 à la poubelle – New Year Reaction GIF by Robert E Blackmon

*Sodabi : Boisson locale togolaise hautement alcoolisée extraite du vin de palme

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